Pluralité d’esprits dans le Trouble Dissociatif de l’Identité.
« Nous sommes une personne multiple », voici les premiers mots d’une patiente qui se présente atteinte de TDI, que nous nommerons Moira. Et avec cette présentation s’ouvre une série de questions cliniques des plus passionnantes sur les capacités adaptatives du cerveau, sur la mémoire, l’identité, la guérison des traumas. Et sur les pouvoirs de la conscience, qui utilise la dissociation à des fins protectrices et ressourçantes, malgré un vécu pathologique et une souffrance réelle.
Mon intérêt pour les formes traditionnelles de guérison et mes expériences dans le domaine des états modifiés de conscience du chamanisme, m’ont amené à considérer une hypothèse qui pourrait s’avérer utile. Elle remet en question notre conception moderne de la personnalité ou de l’identité, et ouvre la voie à une compréhension plus proche de la réalité psychique des patients. Nous allons explorer la possibilité d’avoir recours à cette vision plurielle de l’esprit humain pour accéder et traiter les états de conscience propres aux TDI.
Quelques mots sur le TDI
Le TDI est un trouble dissociatif complexe. Les études s’accordent sur un taux de prévalence du TDI de 1 à 3 % en population générale (1). Seulement 6% seraient diagnostiqués (Kluft, 2009), en raison des nombreuses co-morbidités, d’une méconnaissance des professionnels et d’un masking volontaire ou non de la part des patients. Selon les critères diagnostics du DSM-V, il est caractérisé par la conscience de plusieurs états de soi alternants (alters), qui possèdent chacun leur propre vécu, perception, relation et réflexion sur l’environnement et soi-même. Au moins deux de ces identités ou états de personnalité prennent de façon récurrente le contrôle du comportement de la personne. C’est pourquoi on a longtemps parlé de « personnalités multiples » avant de préférer insister sur la « dissociation de l’identité ». Cette discontinuité du vécu associée à des amnésies importantes non causées par des substances permet la définition du TDI.
Nous souscrivons à l’hypothèse de Putnam (1989) qui a décrit la dissociation comme « un processus normal qui est utilisé initialement à titre défensif par un individu pour gérer des expériences traumatiques, et qui évolue avec le temps vers un processus mal adapté ou pathologique ». Le point de départ n’est qu’une des variantes adaptatives possibles en réponse au trauma. Nombre d’experts font l’hypothèse que des identités alternantes proviennent de l’incapacité des enfants traumatisés à développer un sens unifié de soi. Ainsi, la dissociation dans l’enfance peut servir comme une modalité de résilience développementale, en dépit des graves perturbations psychiatriques ultérieures qui caractérisent les patients souffrant de TDI. (2)
Le patient TDI est une personne singulière qui se vit comme ayant des identités alternantes, séparées, qui ont une autonomie psychologique relative les unes par rapport aux autres.
Le patient TDI est une personne singulière qui se vit comme ayant des identités alternantes, séparées, qui ont une autonomie psychologique relative les unes par rapport aux autres. A divers moments, ces « sujets » peuvent prendre le contrôle exécutif du corps et du comportement de la personne et/ou influencer son vécu et comportement de l’intérieur. Prises ensemble, toutes les identités alternantes forment l’identité ou la personnalité de l’être humain avec un TDI. C’est ce qu’on appelle un « Système ». Même si selon la définition du terme « ensemble d’éléments considérés dans leurs relations à l’intérieur d’un tout fonctionnant de manière unitaire », ce sera plutôt un résultat thérapeutique qu’un point de départ, dans le cas du TDI.
Les alters font partie d’un système, le switch étant le changement d’état de conscience. Le front est l’état de présence où telle identité vient au devant de la scène psychique et peut contrôler le corps. Le reste du temps, les alters existent dans le headspace ou innerworld, l’espace mental ou le monde intérieur. L’inner est un espace psychique ayant fonction de contenant, où les alters peuvent vivre et interagir.
Un ensemble d’esprits
Le TDI est un diagnostic interculturel dont la validité est comparable ou supérieure à celle d’autres diagnostics psychiatriques reconnus. Cependant, on note que des altérations de l’identité et/ou de la conscience peuvent se manifester dans d’autres cultures sous la forme d’une possession spirituelle et d’autres syndromes d’esprits multiples (3). Le TDI est un trouble dont les manifestations peuvent varier et être plus ou moins adaptées suivant les cultures. Ce point nous intéresse, notamment parce que l’étude d’autres cultures non-occidentales abordent le cas de la multiplicité selon un angle qui ne pathologise pas leur porteur. La conscience y est vue d’emblée comme un système relationnel complexe, un espace de médiation entre plusieurs présences issues de différents règnes. La capacité de se déplacer entre plusieurs états de conscience ou « mondes » internes et de fluctuer entre plusieurs identités y est vue comme normale.
Tout comme le fait de communiquer avec les arbres ou les animaux. Les personnes désignées comme expertes de la transe sont même valorisées et reconnues. Le chamanisme laisse grand place à cette pratique dissociative qui advient de manière volontaire et utile à la communauté, dans le cadre de la cure (pouvoir) ou de la recherche d’informations (savoir). En effet, une compréhension centrale que les peuples animistes ont en commun, est le fait de penser l’être humain comme un ensemble d’esprits. Non pas un « individu », mais bien un ensemble de relations qui œuvrent dans l’invisible, pouvant entraver ou soutenir la personne dans sa vie. Le chaman peut à loisir « devenir autre » et se vivre comme une entité surnaturelle qui voyage en esprit vers d’autres domaines de la réalité, les mondes spirituels, puis qui va réintégrer son corps et sa personne ordinaire. Le changement d’état est ici sain et cloisonné par des pratiques rituelles, dans un but thérapeutique. Son travail est ensuite d’intégrer les visions qu’il a acquises chez les « esprits » à la vie de tous les jours. Il verra alors ses alter ego en état de transe comme ses alliés invisibles une fois revenu en état de conscience ordinaire. Il a appris à communiquer avec ces parts non-humaines librement et en connaissance de cause. Son sens de l’identité reste intact.
Présentation du système de Moira
Moira est une femme de trente ans, elle vit avec son compagnon depuis huit ans, avec qui elle a deux enfants en bas âge et souffre de handicap physique (exostoses invalidantes). Elle travaillait dans l’éducation nationale avant que la sévérité de ses troubles associés ne l’oblige à l’arrêt, à la suite de graves harcèlements. Son diagnostic de Trouble Dissociatif de l’Identité est avéré par plusieurs psychiatres. Elle s’empare elle-même très bien des outils et des conceptualisations à sa disposition afin d’appréhender sa particularité. Elle milite dans les réseaux de pair-aidance et les forums d’entraide de personnalités multiples. Je souligne que l’article a été relu et accepté par ses soins, afin de représenter au mieux ce qui fait la spécificité des profils TDI. A savoir, dans le cas présent, plusieurs identités qui ne possèdent pas les mêmes connaissances sur le vécu de Moira.
En effet si la partie « Hôte » a le même nom civil que la personne, c’est une sorte d’interface avec la réalité extérieure, qui a peu accès au monde intérieur et très peu de souvenirs d’enfance. D’autres parts sont trauma-holders, portent en elles le trauma et sont parfois très éloignées de la conscience, comme « Darius » et « Renard ». Ce que l’Internal Family System appelle des exilés. D’autres parts sont des protecteurs, tels « Rage » et « Eric » qui n’acceptent aucune incursion vers les domaines qui pourraient activer la réminiscence. Empêchant ainsi paradoxalement le traitement et la guérison. D’autres deviennent des parts malades, qui portent les symptômes qui découlent indirectement du trauma, comme la dépression, la phobie médicale ou l’anxiété sévère. L’une d’entre elles, « Julia », ne se vit pas comme humaine. D’autres encore sont des parts persécutrices, comme « Absalem » qui vient de sortir d’une longue dormance. Il déstabilise le système, terrorise les parts plus fragiles et souhaite attenter à la vie de la personne. Les alters ont tous leur propre personnalité, leur nom, pronom, leurs buts et leurs préférences propres. Le ton de voix, la posture, le niveau de langage et de compréhension de Moira se modifient en fonction.
Les parts qui se présentent en premier en thérapie sont, évidemment, les protectrices. L’une d’elle, Rage, m’écrit un mail demandant des précisions sur mon approche intégrative dans le traitement du trauma, avec une méfiance concernant l’usage de la transe hypnotique et chamanique. Elle m’envoie une série de questions qui ont pour but de sonder mes motivations, car elle a eu à subir les dérives d’une psychiatrie qui pathologise à outrance et ne considère plus toujours en premier lieu l’humanité de ses patients. Il faut gagner la confiance des personnes atteintes de troubles mentaux sévères, qui ne se livrent pas facilement, en prenant au sérieux leur réalité psychique, leurs solutions adaptatives, et en respectant leur organisation face à la réalité insupportable du trauma.
Elle m’écrit un courrier détaillant les personnalités connues qui se présentent chacune leur tour. « Nous sommes une personne multiple. Nous sommes un système de huit personnes, il y a actuellement huit colocatêtes dans notre système (même si je crois que le terme médical est alter ?) ». Effectivement, les termes sont importants. Alter signifie alternant, mais ces êtres qui ont accès à une conscience personnelle sont-ils des alter ego, ou des altérations d’une vraie personne, ou des altérités purement extérieures à cette personne ? Ou encore des colocataires dans la même tête, avec tous les problèmes de cohabitation que cela suppose. Notamment la question de l’âge de ces parties, et de leur sexe, qui peut amener une dysphorie de genre importante. Notons le suivi psy assez chaotique jusqu’au diagnostic de TDI il y a deux ans.
Les parts dissociées comme de vraies personnes
« Nous remettons en question le fait que l’hôte soit une PAN (personne apparemment normale), ou « l’originale ». Selon nous, nous sommes tous des alters dans le système, y compris notre hôte. Nous sommes des parties d’un système dans lequel nous sommes à égalité. De fait, nous n’avons pas l’intention de fusionner car notre multiplicité n’est plus pour nous notre problème principal et nous craignons de ne plus pouvoir assumer notre vie si nous ne devenons qu’une seule personne. Nous trouvons un avantage dans la multiplicité aujourd’hui et notre masking est suffisant pour ne pas nous poser de problème au quotidien. Ce qui nous pose des problèmes, ce sont nos symptômes annexes : crises d’angoisse de certains, illégitimité et autoritarisme de l’hôte, déni, cauchemars, troubles du sommeil, troubles alimentaires, etc. Cependant, tous les professionnels que nous rencontrons pose cette multiplicité comme étant l’origine du problème et donc l’aspect à traiter pour « devenir normal ». Notre multiplicité n’est pas la source de notre handicap psychique. »
C’est donc Rage, l’alter protectrice du système, qui établit les bases de notre thérapie. Il me semble que sont posés là nombre de vrais problèmes auxquels nous sommes confrontés en tant que professionnels de santé mentale. Nous devons nous positionner. Pour ma part il m’a l’air établi que le TDI ne survient pas chez une personne unifiée avec une « personnalité centrale normale » qui se fracturerait. Le TDI provient plutôt d’un échec de l’intégration, causée par des expériences qui submergent la personne. Je peux donc traiter toutes les parts qui se présentent comme étant les représentants légitimes du tout, de l’entièreté de la personne, sans les juger. Et mon but thérapeutique peut se résumer dans les 3C : Co-Conscience, Communication, Coopération. L’objectif ne sera pas de fusionner ces personnalités entre elles pour n’en former qu’une, mais de restaurer l’agentivité, de telle sorte que chaque partie puisse trouver son propre rôle préférentiel. Avec cette volonté thérapeutique de réconcilier les alters, de reconnaître la multiplicité des états internes et d’aider le système à vivre ensemble. Et ainsi proposer une thérapie adaptée à chacun.e pour réduire ses symptômes douloureux. Aussi la thérapie est plus une collaboration qui exige la reconnaissance de tous.tes les parts impliquées, le but du traitement étant un fonctionnement intégré. Ce qui suppose une confiance certaine dans la santé intrinsèque des patients dissociés. (4)
Quand Moira vient en séance pour la première fois, c’est le Système entier qui se présente. Les switch interviennent rapidement, et c’est à chaque fois une rencontre. Encore plus qu’avec d’autres patients, il nous faut exercer notre attention afin de revenir à chaque nouvelle présence avec curiosité. Car on peut considérer chaque alter comme ayant une existence propre, même si elle est une partie seulement de l’histoire. La personnalité est une construction hétéroclite, mouvante dans le temps, basée sur les identifications, expériences et rencontres, et permet de s’ajuster plus ou moins bien à la réalité extérieure. Ainsi avoir plusieurs esprits alternants n’est pas en soi un signe de mauvaise santé mentale. Cela indique la nécessité pressante de s’adapter à des conditions adverses voire impossibles. Le système nerveux est câblé pour survivre, pour résister, même en empruntant des chemins détournés. La personnalité s’est donc fragmentée ou plutôt s’est développée de manière parallèle dans plusieurs directions. Permettant ainsi de concilier l’irréconciliable, ou de surmonter des paradoxes relationnels invivables. La personne peut fonctionner en fractionnant non seulement les personnalités, mais surtout l’impact des traumas et ses conséquences sur la vie psychique. Ce qui devient un travail collaboratif, plus qu’un fardeau à porter seul. La dissociation des identités est bien une manière de rester en lien, quoi qu’il en soit, et de se vivre comme ayant des alliés internes et des figures d’attachement ressources.
Chez un Système complexe comme celui de Moira, il y a sur le devant de la conscience une ou plus souvent deux parts qui co-existent en co-front afin de mieux réguler le rapport à l’environnement et aux autres. Chaque part est vraiment à prendre comme un tout, comme une vraie personne, celle à qui vous parlez sur le moment. Et vous pouvez l’interroger sur ses rêves et ses espoirs, et non seulement sur ses rôles et ses mécanismes de défense liés à ses traumas, qu’elle isole et ne partage souvent pas avec les autres. Vous pouvez lier une relation avec elle. Qu’il y ait devant vous le corps d’une femme jeune, mais que votre interlocuteur soit Eric un homme âgé de la cinquantaine, Vanille une enfant de 8 ans ou même Renard une part animale qui n’est pas douée de langage n’y change pas grand chose. Et alors que vous commencez de percevoir le sens et la fonction de telle ou telle présence, vous gardez à l’esprit le tableau général. Il n’y a pas UNE vraie personne parmi toutes celles-là, mais l’ensemble de toutes ces parts dissociées doit permettre à un sens global d’émerger et de collaborer. Le tout est plus que la somme de ces parties. Elles essaient, chacune à leur manière, de traverser la vie même si elles n’ont d’existence que dans l’invisible. Car l’invisible, c’est la relation. Et notre esprit est le lieu de rencontre de ces relations qui nous composent.
Un espace de rassemblement
Un des rôles premiers du thérapeute va être de restaurer la capacité de dialogue, interpersonnel et intérieur. Et pour ce faire, apprendre à rester en présence de toutes ces parties, ouvrir un espace pour que ce lieu de rencontre prenne place. C’est ainsi que Moira a développé un sens de l’espace interne (inner) qui s’est structuré jusqu’à prendre la forme d’une maison, le Dôme. Avec des lieux distincts, où chacun.e a sa propre chambre qui lui ressemble et où des espaces communs ont été définis. Dans la chambre, chacun peut vivre lorsqu’il n’est pas en conscience / en lien avec le monde extérieur. Il n’y a ainsi pas d’invasion ou de contamination psychique entre les parties, qui peuvent décider d’un moment opportun pour partager certains souvenirs, et les émotions qui y sont liées. C’est la mise dans le « pot commun ». Moira se sert, comme beaucoup de personnes multiples, des outils numériques spécifiques tels que Simply Plural ou Antar. Par ce biais écrit chaque part peut prendre la parole et interagir avec les autres. Le « carnet de l’inner » permet aussi de garder mémoire de l’évolution du Système et donne une représentation visuelle sous forme d’avatar de chaque alter, ainsi que des caractéristiques de sa chambre. Nous avions déjà noté (article sur le Lieu du coeur) comment la création d’un espace interne sécure était une étape cruciale de la thérapie des traumas, surtout chez les personnes ayant subi des effractions physiques et psychiques précoces. Comme dirait Julia « Pour moi l’inner et le monde physique ont la même réalité. »
Ensuite, il y a la manière d’entrer en relation avec ces parties dissociatives en thérapie. Et là, le travail du jeu avec les enfants, l’expérience de l’hypnose, et celles des voyages de la conscience chamanique m’aident beaucoup. Ouvrez vos perceptions et votre imagination. C’est ainsi qu’il faut aborder nos patients les plus dissociés. Revenir à chaque fois à ce qui se produit dans la séance, quel esprit est présent et comment. Ce qu’il pense des autres parts, ce qu’il ressent, ce qu’il aimerait faire une fois son rôle accompli. Accueillir tous ceux qui existent, sans les juger, sans les rejeter, en essayant de les intégrer au mieux. Même Julia, la part dépressive qui semble enfermée dans une boucle traumatique de rejet. Même Absalem, la part au narcissisme grandiose, avec ses idées mystiques paranoïaques qui aimerait prendre le contrôle de l’ensemble du Système afin d’éviter la souffrance terrestre — et les faire tous basculer dans le monde spirituel au moyen du suicide. Même quand Laora ou Eric, les parts logiques et raisonnables, n’ont pas les moyens d’agir, et que les part puissantes comme Vanille n’ont pas conscience des directions plus sensées que pourraient adopter le Système. Car le patient n’est aucune partie, c’est l’ensemble de ces identités parfois antagonistes.
Un changement de paradigme à venir ?
Le TDI est une pathologie, et aussi une incroyable création spontanée, qui permet de continuer de vivre et d’échanger avec ses semblables. C’est un usage intelligent de notre imagination créatrice. Là où les peuples premiers sont en lien à un imaginaire emprunt de magie, de présences surnaturelles, d’échanges symboliques avec les forces de la nature, les esprits des ancêtres et des dieux… Nous sommes habités d’autres imaginaires concernant les « esprits », dont les fonctions s’avèrent semblables. Où la dissociation peut jouer un rôle positif dans le travail de guérison.
Il est à espérer que notre vision de la psychologie et de la psychiatrie soit durablement modifiée par les études contemporaines sur le trauma, notamment celles portant sur les Troubles Dissociatifs. Toute notre psychopathologie pourra être lue à la lumière des connaissances acquises sur le fractionnement de la conscience et l’autonomisation de certaines parts émotionnelles suite au trauma, que ce soit pour traiter la psychose (voix schizophréniques, persécution paranoïaque), les troubles de la personnalité borderline et la bipolarité (présence d’états du moi contradictoires, labilité de l’humeur) ou la toxicomanie (amnésies et dissociations de l’identité induites par les substances). Comprendre ce que vivent nos patients de l’intérieur nous permettra ainsi de nous rapprocher de ce qui fait réellement leur souffrance, et d’avoir les moyens adéquats pour y répondre.
Car c’est il me semble la spécificité de l’approche par l’hypnose en santé mentale. Nous sommes habitués à entrer en transe. Nous savons d’expérience que l’esprit n’est pas uniquement limité à notre conscience. Nous apprenons à voyager d’un état de présence à un autre, à passer de la surface aux profondeurs, à déplacer notre attention, à changer d’espace et de temps, et à communiquer avec d’autres (res-)sources à l’intérieur de nous. En un mot, nous sommes des spécialistes de la dissociation non traumatique, naturelle, adaptative. Nous pouvons de ce fait créer les dispositions favorables pour que nos patients, à leur tour, reconnaissent et embrassent ces mêmes capacités positives de la dissociation, qu’ils fassent confiance aux ressources inhérentes aux mécanismes dissociatifs. Grâce à la transe hypnotique, nous pouvons explorer ces territoires de l’esprit encore méconnus.
Nicolas D’Inca
Publié dans la revue Hypnose et Thérapies Brèves, Hors série N°18, Psychotraumatisme
Références
(1) Jonhson, Cohena, Kasena & Brook, 2006 ; Ross, 1991 ; Sar, Akyüz & Dogan, 2007 ; Waller & Ross, 1997
(2) Brand, Armstrong, Loewenstein & McNary, 2009
(3) Cardeña, Van Duijl, Weiner & Terhune, 2009
(4) Richard Schwartz, Pourquoi nous sommes essentiellement bons, éditions Quantum Way, 2023
Ressources
Lignes directrices pour le traitement du trouble dissociatif de l’identité chez les adultes, Société Internationale pour l’Etude du Trauma et de la Dissociation, 2011
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